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Air France - une Histoire d'Amour
28 décembre 2006

LE PREMIER DÉTOURNEMENT D’UN AVION COMMERCIAL

Hermínio da Palma Inácio a été un des hommes qui a provoqué plus de cauchemars au dictateur portugais Salazar. Bien que rongé par des maladies et par des séquelles des prisons politiques,  il sourit encore aujourd’hui et ses yeux brillent, quand il se souvient de ses aventures. 

- Le 10 Novembre 1961, un vendredi, un Super- Constellation de la TAP a décollé de l’aéroport de 1001796MCasablanca. Il était 09h15. Le commandant José Marcelino a fait monter l’avion et a mis le cap sur Lisbonne. Les passagers pouvaient désormais détacher les ceintures et fumer. Il faisait beau. On s’attendait à un voyage calme d’environ une heure et demi. L’équipage ne pouvait pas savoir que, parmi les dix-huit passagers, il y avait six guérilleros commandés par Palma Inácio.

- Après trente minutes de vol, Palma Inácio est entré de surprise dans le cockpit et a dirigé son revolver vers la tête du commandant : «Ceci est une action révolutionnaire. Je ne veux pas faire du mal à personne !».

Pour la première fois, dans l’histoire de l’aviation commerciale, un avion était détourné, en plein vol.

- Le plan des pirates de l’air était risqué : suivre la route normale vers Lisbonne, simuler un atterrissage, faire une remise de gaz et survoler Lisbonne, la banlieue sud, Setubal, Beja et Faro, pour lancer 100 000 tracts, appelant à la révolte populaire contre la dictature. Puis, continuation sur Tanger où ils demanderaient l'asile politique. 

- Le copilote, le mécanicien-chef et le mécanicien de vol n’ont pas dit un mot. Le commandant Marcelino, menacé par l’arme, a essayé de convaincre le guérilléro de désister de l’opération.  Lui a ditPalmaInacio_Marcelino que l’avion n’avait pas assez de carburant pour rentrer à Tanger. Mais Palma Inácio, qui était mécanicien d’avion et qui avait même une licence de pilote, obtenue aux États-Unis, a demandé le carnet de l’avion et a vérifié que l’avion avait fait les pleins complets à Casablanca.

- Le commandant a essayé alors de trouver une autre chose : «Comment vous allez lancer vos tracts ? Je ne peux pas ouvrir les portes de l’avion !». Palma Inácio lui a répondu: «Vous pouvez! Il suffira de voler le plus bas possible, dépressuriser la cabine et ouvrir les issues d’émergence.». 

- Derrière, dans la cabine, encore plus facile. Les autres cinq révolutionnaires n’ont pas eu besoin de lever la voix ni de montrer les armes. Le steward et les deux hôtesses, après avoir distribué des boissons aux passagers, ont même participé, plus tard, au “moment historique”, aidant au lancement des tracts.

- L’approche de Lisbonne s’est fait comme prévu par les pirates. Autorisation pour l’atterrissage et, au dernier moment, remise de gaz et éloignement de l’aéroport.  José Marcelino a communiqué avec la tour, expliquant difficilementqu’on l’obligeait à survoler Lisbonne et le Sud, à basse altitude”. Un général des Forces Aériennes Portugaises, qui pilotait un monomoteur dans les parages, a tout compris et a donné l’alerte. Quelques minutes après, deux F-84 décollaient d’une base militaire, avec des instructions pour abattre l’avion, au cas où le pilote n’accepterait pas de se poser sur un aérodrome portugais. Heureusement, ils n’ont pas repéré l’avion de la TAP... Ou ils n’ont pas voulu obéir!

- Le commandant Marcelino a maintenu l’avion à 100 mètres d’altitude, échappant aux radars et aux F-84, tandis que les tracts étaient lancés sur le territoire, à commencer par le centre de la capitale portugaise. Mission accomplie, cap sur Tanger où il atterrit à 12h50. Premières pages dans des journaux de tout le monde et Salazar en rage. Finalement, c’est ce que les révolutionnaires voulaient justement…

- L’avion est rentré au Portugal, après vérification qu’il n’y avait pas d’explosifs à bord. La police politique portugaise était persuadée que le commandant était complice des pirates de l’air, car il avait changé d’avion en dernière minute, pilotant l’avion pour Casablanca au lieu de celui à destination de Porto. Mais la raison avait été une autre : il voulait faire le même vol que l’hôtesse Luísa Infante, sa future épouse. Mariage qui dure jusqu’à nos jours. Résultat : interdiction de voler pendant un mois et plusieurs interrogatoires, pendant lesquels il n’a jamais dévoilé la vraie raison du changement de vol. 

henrique_galvao- Toute l’opération avait été planifiée par le capitaine Henrique Galvão (voir photo), le même qui a pris en otage le paquebot “Santa Maria”. Elle devrait être suivie d’un soulèvement militaire qui n’a pas eu lieu. 

- Malgré les pressions diplomatiques du régime fasciste portugais, les guérilleros ont pu se réfugier ensuite au Brésil.   Le commandant Marcelino a continué à piloter des avions jusqu’à l’âge de sa retraite, a atteint 25 000 heures de vol et a collaboré avec la TAP, pour des affaires techniques, jusqu'à l’âge de 80 ans.

- L’issue heureuse de ce détournement a été due, en grande partie, à l’habilité et expérience de celui qui avait été un des principaux pilotes de chasse des années 30 et 40, un vrai as de l’aviation – le Commandant Marcelino.

- Vieux temps où, même dans un détournement d’avion, on pouvait découvrir des aspects romantiques, aventuriers et humains…

Malheureusement, la suite n’a pas été fameuse et a atteint même des dimensions épouvantables, comme le 11 Septembre à New York….

(Traduction-adaptation d’un reportage du journal Correio da Manhã du 09.11.2006 et d’un article d’une nièce du commandant Marcelino, publié dans son blog, par Gabriel de Sousa)

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Commentaires
I
magnifique expérience ! c'est époustouflant,<br /> cet homme courageux et ces pirates qui au fond n'étaient pas bien méchants, ils voulaient juste imposer leur mécontentements,<br /> on le fait aussi sur le sol,<br /> mais quand même, dans tout cela ou est le respect de l'autre ?
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